Le Centre d’Ivry est arrivé à saturation, les ONG internationales préviennent d’arrivées importantes pour l’été, l’invisibilisation des familles en hôtels sociaux est toujours d’actualité… Les familles sont considérées comme un “public vulnérable”, et pour cette raison c’est du Département que dépend leur mise à l’abri d’urgence, de l’Etat pour la suite. Quelle est la situation pour les familles exilées ? Petit état des lieux des derniers mois.
L’enregistrement sans cesse retardé. La PADA familles de Paris (CAFDA) n’ouvre que deux heures après le CESA, où doivent se présenter les adultes demandeurs d’asile passant par le Centre de la Porte de la Chapelle. Résultat ? Soixante rendez-vous à la Préfecture de Paris pour enregistrement de la demande d’asile sont délivrés par jour : il n’en reste que peu pour les familles. Le même problème se pose avec la Préfecture de Créteil, dont dépend le Centre d’Ivry : en moyenne, l’enregistrement se fait au bout de deux mois. Cet accès retardé à l’enregistrement produit aussi des retards dans l’accès à l’allocation (ADA) : une famille est donc sans ressources pendant cette période d’attente.
La “mise à l’abri” problématique à l’hôtel. Que ce soit par le biais du 115 ou par un placement direct de la mairie, un problème d’accès aux ressources se pose pour les familles “prises en charge”. En effet, le retard à l’enregistrement rend difficile l’accès à la nourriture, aux transports, etc. Mais même lorsque l’ADA est versée, elle n’est souvent pas suffisante pour tout faire : quand la Mairie indique à la famille un restaurant social où se rendre, celui-ci est très souvent loin de l’hébergement, et il faut alors choisir - absurdité totale - entre payer les transports pour aller manger gratuitement, ou dépenser son argent dans la nourriture sans se déplacer (sachant qu’il n’est presque jamais possible de cuisiner dans les hôtels). Il est par ailleurs très difficile pour ces familles d’avoir les informations nécessaires sur les infrastructures accessibles de leur hébergement (hôpital, parcs, transports, école) et plus généralement sur les démarches qu’elles ont à mener. Ainsi, sans les maraudes solidaires et les accompagnements quotidiens de l’équipe familles, ces personnes resteraient à la rue bien plus longtemps, n’auraient la plupart du temps pas à manger dans les hôtels, et les enfants ne seraient pas scolarisés.
Et après le Centre d’Ivry, on va où ? Les familles restent au Centre d’Ivry trois mois au maximum, et sont ensuite envoyées en CAO. Tous les CAO ne se valent pas, et dernièrement une famille irakienne est revenue à Paris, fuyant son centre des environs de Lyon : manque de nourriture, pas d’eau chaude, et violences racistes de la part du personnel.
Pour les cours de français ? Ils ne sont proposés que très tard dans les procédures aux familles hébergées en hôtels ; souvent assurés en CADA ; prévus uniquement pour les enfants dans le Centre d’Ivry*.
Qu’en est-il de l’application du règlement Dublin ? Le règlement Dublin III s’applique aux demandes d’asile des familles. Dans le Centre d’Ivry, aucun suivi juridique n’est proposé aux familles dublinées. Plus généralement l’accès à l’information juridique est empêché ; il était prévu que le GISTI ait un local à l’intérieur du Centre, mais cela ne leur a jamais été fourni.
Quelles sont les actions du CPSE-Paris d’Exil ? A la fin de l’année 2016, le CPSE a lancé une campagne de référés libertés afin que les familles demandeuses d’asile accèdent à leurs droits dans les délais légaux. Cette campagne a concerné 35 dossiers, dont 24 en procédure Dublin et 11 en procédure normale. Les 11 familles non dublinées ont été enregistrées dans les cinq jours après le passage au Tribunal Administratif (au lieu de deux mois à l’époque), eu un CADA en moins d’un mois ; elles ont toutes obtenu la protection de l’Etat (protection subsidiaire ou statut de réfugié pour 10 ans) en moins de six mois. Malgré tout, cette campagne n’a pas donné lieu à l’établissement d’une jurisprudence. De manière générale, nous militons pour un accès accéléré au CADA pour toutes les familles et pour qu’elles soient dédublinées.
Dans ces situations, les droits de l’enfant sont bafoués, comme ceux des demandeurs d’asile ; la santé des plus petits est menacée par l’insalubrité de certains hébergements et par l’accès difficile à la nourriture et aux soins. Avec la “mise à l’abri” plus rapide, les familles sont invisibilisées, alors que très largement isolées dans des hôtels où seule la solidarité permet une vie plus décente. Où sont les CADA promis par l’Etat ? A quand - au moins - une application stricte du droit pour ces familles ?
* Le collectif formé à Port à Langlais, autour du Centre d’Ivry, cherche des soutiens pour les cours de français aux adultes ; avis aux amateurs.trices !
Ivry's Center reached saturation, international NGOs are alerting on important arrivals during the summer, the invisibilisation of families living in social hostels is still current... Families are considered a "vulnerable group", for this reason the responsibility of their "emergency sheltering" is managed by the Department, and then by the State. What is the situation for exiled families ? Small overview of the situation those last months :
Registering for asylum seeking is constantly delayed. Paris' PADA for families (first step in the procedure of asylum seeking to register) (the CAFDA) opens only two hours after the CESA, where adults sheltered at the Porte de la Chapelle's center must go. The result being that sixty appointements are given per days for the appointment at the Préfecture to register for asylum seeking : leaving only a few for families. The same problem is encountered at the Créteil Préfecture, of which depends Ivry's center : on average the registration takes two months. This delayed access to registration snowballs on the obtention of the allocation (ADA) : meaning that during this period of time a family doesn't have any means of support.
The problematic "sheltering" in hostels. Be it through 115 or through a direct placement by the municipality, the access to means of living decently is problematic for families "sheltered". Indeed, delayed registration makes it difficult to get food, transportation etc... Even when the ADA is received, often its not sufficient for everything : when the municipality gives the direction to a "social restaurant", it's often very far from the hostel, raising the absurd question of the choice between paying transports to eat for free, or spending the money for food without moving (it's almost impossible to cook in those hostels). Moreover it's really complicated for families to get informations on facilities close to their hostel (hospitals, parks, transports, schools) and more broadly on the procedures to be done by them. Thus, without teams of solidarity patrols, and daily support from the "family" team, those people would stay a longer time on the street, wouldn't have food in their hostels, and children wouldn't all go to school.
And after Ivry's centre, where one goes ? Families stay at the center for maximum three months, they are then being sent to CAO (welcome and orientation center). CAO aren't all correct and good. Lastly a family from Irak came back to Paris, fleeing from their center of the Lyon's suburb : almost no food, no water, and racist abuses from the staff.
French courses ? For families sheltered in hostels hey are offered very late in the proceedings ; often provided in CADA (center for asylum seeker) ; at Ivry's center they are proposed only to children*.
What about the application of Dublin's resolution ? The Dublin's resolution III, concerns also asylum seeking families. At Ivry's center no legal follow-up is proposed to "dublined" families. More broadly the access to legal information is hindered ; the association Le GISTI was supposed to have a place there to give legal aid and advice inside the center, it was never given to them.
What action do CPSE-Paris d'Exil take ? At the end of 2016, the CPSE launched a campaign of petition for protection of fundamental liberties, so that asylum seeking families get access to their rights in the intended legal delays. This campaign concerned 35 files, of which 24 were under Dublin's resolution and 11 under normal proceeding. The eleven non dublined families where registered in five days after going to the Administrative Court (instead of two months at this time), got a place in a CADA in less than a month ; all of them got protection from the State (subsidiary protection or refugee's status for ten years) in less than 6 months. However this campaign didn't create jurisprudence. Generally speaking we fight for an accelerated access to a CADA for all families, and for their "dedublination".
In those situations, children's rights are trampled, as well as asylum seeker's ; the health of very young children is threatened by the insalubrity of some of the housing and by the difficulty to get access to food and care. With a faster "sheltering", families are invisibilised, while very largely isolated in hostels where only solidarity makes it possible to get decent conditions of living.
Where are the CADAs promised by the State ? When - at least - will we get a strict application of the law for those families ?
* The collectif, created at Port à Langlais, next to Ivry's center, is looking for people to give french class to adults ; to thon interested !