Ce que l'on sait de la future loi sur l'immigration (prévue pour 2018)
La possibilité d’un renvoi vers un pays tiers sûr (donc hors UE) pourrait être utilisée par l’Ofpra pour refuser un dossier sans même le consulter, bien que ce pays ne soit ni celui d’origine ni de résidence, mais seulement un pays par lequel la personne aurait transité. Cette irrecevabilité d’un dossier sur la base du passage par un pays de transit est contraire au droit d’asile et à la convention de Genève.
La durée légale de rétention des étrangers en attente d’expulsion est de 45 jours. Le gouvernement voudrait la doubler. À titre exceptionnel le juge pourrait ordonner en plus une prolongation de 15 jours, en cas d’obstruction à son éloignement par la personne concernée.
> En France il y a 24 centres de rétention, la capacité totale est de 1 823 places, plus 231 dans des locaux de rétention administrative. En 2016, environ 46 000 personnes sont passées par un centre de rétention, presque 50% outre-mer (notamment à Mayotte). 182 enfants (malgré les nombreuses condamnations de la Cour européenne des droits de l’Homme) ont été enfermés dans ces centres en métropole, dont 92 de moins de 5 ans. À Mayotte ils étaient 4 325 enfants à y avoir transité en 2016. L’enfermement ne mène pas toujours à l’expulsion : en 2016, sur 23 000 personnes enfermées, moins de 9 500 ont été expulsées, dont environ la moitié vers un pays de l’UE.
> Le 18 octobre, une annexe du TGI de Bobigny sera inaugurée au bord des pistes de Roissy, accolée à la zone d’attente de l’aéroport (ZAPI), où la PAF refuse l’entrée en France à certaines personnes selon des critères fixes mais souvent invoqués de manière arbitraire. Le 18 septembre, l’OEE demandait à la ministre de la justice de renoncer à « créer les conditions d’une justice dégradée, sur le tarmac d’un aéroport, loin des palais de justice et du regard de la société civile ». Dans un communiqué du 10 octobre, le Défenseur des droits estime « que le droit à une juridiction indépendante et impartiale […] et les droits de la défense sont susceptibles d’être gravement compromis » et « recommande de surseoir à l’ouverture de l’annexe ».
Cette mesure est accompagnée de celle du régime de la “retenue”, actuellement de 16 heures, le temps de la vérification de droit au séjour, elle passerait à 24 heures.
Pour les personnes en procédure Dublin, le projet propose de les envoyer en CRA dès que la demande de “reprise” par l’autre État européen serait envoyée, alors qu’il fallait jusque-là attendre l’arrêté de transfert, c’est-à-dire que l’autre Etat ait accepté.
> Le 27 septembre la Cour de cassation a rendu un arrêt, stipulant que la loi n’autorise pas à mettre en rétention les personnes en procédure Dublin. Déjà en mars la CJUE avait rappelé que la mise en rétention des personnes dublinées ne pouvait se faire que si les lois du pays l’y autorisait. Le “risque de fuite” invoqué pour justifier l’enfermement n’est pas une notion définie, et ne peut pas justifier cette décision. La loi sur l’immigration de 2018 devrait supprimer cette “faille”. En attendant les juges des libertés et de la détention devraient lever toute rétention pour motif de fuite.
> Afin de contourner cela de plus en plus de personnes qui font l’objet d’un arrêté d’expulsion sont assignées à résidence. Le Conseil d’État a été saisi suite à la demande d’une personne dans ce cas, et a transmis une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil Constitutionnel sur cette question. Il a estimé que les dispositions du CESEDA qui justifient cette situation portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment la liberté d’aller et venir. Le Conseil Constitutionnel a trois mois pour répondre.
L’article L. 561-1 du CESEDA prévoit une dérogation à la durée maximale de six mois prévue pour l’assignation à résidence d’un étranger. S’il justifie soit être dans l’impossibilité de quitter le territoire français soit ne pouvoir regagner son pays d’origine ni se rendre dans aucun autre pays, notamment pour les étrangers faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion, aucune borne temporelle à l’assignation à résidence n’est définie. Ce même article prévoit en outre, que l'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion peut, quel que soit l'endroit où il se trouve, être astreint à résider dans des lieux choisis
La protection subsidiaire, d’un an renouvelable, deviendrait une carte pluriannuelle, de quatre ans maximum.
12 500 places d’hébergement devraient être créées pour les demandeur.se.s d’asile et les réfugié.e.s.
Le budget de la Mission Immigration, Asile et Intégration devrait augmenter de 25% en 2018. Et de 30% d’ici à 2020 pour l’intégration.
L’Ofpra aura 15 postes supplémentaires, la CNDA, 51 (permettant la création de deux nouvelles chambres de jugement).
Pour l'aide au développement, Macron voudrait la conditionner aux seuls pays qui acceptent de reprendre leurs ressortissants.